Une escapade Catalone (par Olivier Salon)

Le talgo est un train trapu de nuit, assez long et court sur pattes, et qui dessert l'Espagne.
Bien qu'un peu frais quand on y rentre, le peu chaud Talgo vous conquiert rapidement par son allure un peu désuète et ses formes arrondies, par une atmosphère carrément inhabituelle;

Quel douillet confort !
Quelle ambiance chaleureuse se dégage de ce tortillard ou non commençons au bar et finissons royalement installés dans des couchettes à baldaquins et ou le tango du Talgo finit par nous bercer d'un sommeil préparateur aux plus grandes courses espagnoles : c'est que nous sommes une bande d'une douzaine d'Arcueillais, prêts à faire tomber les plus belles catalones parmi les voies rocheuses d'escalade.

Arrivés.
Barcelone et sa trépidation nous accueille. Cette capitale de la Catalogne est en chantier perpétuel. Nous avons juste le temps d'y découvrir ses fameux loueurs de voiture et nous voilà partis à bord de 3 somptueux véhicules ou les sacs et le matériel sont entassés pèle-mêle ...

La route est longue jusqu'à Siurana. Nous quittons le bord de mer et nous enfonçons dans la Catalogne sauvage. La route se fait escarpée: c'est soudain une piste aux cailloux tranchants que nous empruntons (nous n'oublierons pas de la rendre); nous évoluons dans un paysage de western. Le roc est rouge et nos nez aussi.

Enfin nous débouchons sur un plateau, apparemment à mille et mille de toutes contrées habitées, duquel une immense dalle calcaire forme le couvercle. L'à-pic est raide et le paysage magnifique.

Mais nos yeux n'ont pas fini de s'ébahir : un village est juste là, surréel, et nous le découvrons en bons touristes.

On nous suggère de planter les tentes par là dans un cadre féérique, au sommet de ce donjon rocheux.









Mais brève de talivernes; Échauffons-nous et les premières voies sont là : le Cosma embrasse les montagnes. Une multitude grouillante d'Arcueillais arachnéens gravit verticalement des lignes invisibles sur les parois, suivant une évolution méthodique.











Nous resterons 3 jours sur ce site admirable : un vieux troquet nous reçoit un jour, et l'atmosphère est semblable à celle de ces refuges reculés ou seuls des initiés se retrouvent pieusement autour d'un poêle ésotérique.

Nous voila repartis à bord de nos vaisseaux spacieux vers un nouveau site, non loin de là : La Mussara.
C'est un si joli endroit qu'on a toujours envie d'y retourner, attiré par on se sait quelle force occulte : Moussara s'aimante, Olé !

Cette fois, c'est une grande barrière rocheuse qui sinue (à l'aplomb des pylônes électriques) au sein d'une belle forêt.
La source coule et chante à deux pas et nous plantons nos tentes derechef.

Notre groupe s'éparpille toute la journée durant sur la paroi. Lao Tseu l'a dit : "il faut trouver la voie". Et là, chacun trouve sa voie, sur ce splendide calcaire enfoncé dans la forêt. Mais les plus beaux coins ont tous une fin; nous avions prévu un troisième et dernier site à notre périple.

Après une courte halte au bord de mer, nous nous dirigeons vers Montserrat.





Montserrat est un panaché de Lourdes et du Mont Saint-Michel.
Là, enchâssé dans le roc, un monastère ouvre ses portes aux innombrables visiteurs; une foule intense se presse pour visiter ce monstre de laideur. Le plan d'information ne s'y trompe pas : tous les marchands du temple sont là et il est de mauvais ton de revenir de Montserrat sans une reproduction de la fameuse vierge noire, en plastique made in Corea.















La nature nous offre cependant un spectacle plus grandiose; la montagne est de roc, et ce roc est un véritable gâteau, conglomérat de galets tenus par une espèce de ciment terreux : c'est le poudingue.

Il nous faut une bonne après-midi pour nous faire à ce nouveau rocher, que nous escaladons presque à l'aplomb du monastère: les touristes nous lancent des cacahuètes, tandis que nous évoluons à travers les plis de cet énorme gâteau en forme de chevelure, tels des poux fous, des poux dingues.




Or le mauvais temps s'installe. Le vent souffle, des rafales nous cinglent le visage et nous envisageons une nuit agitée et peu alitée. Mais les organisateurs ont tout prévu : ils connaissent l'existence d'un gîte et, alors que rage fait la tempête, retrouvent ce refuge nanti d'un large dortoir ou bientôt, en un groupe de gorges d'une banlieue sud de Paris s'entassent cent tasses de lait chaud.
(Rappelons-nous ce conseil avisé que prodiguait Alphonse Allais à un voyageur effaré égaré dans une forêt noire :
Par le bois du Djin ou s'entasse de l'effroi
Parle, bois du Gin ou cent tasses de lait froid).

Dès le lendemain, le grand beau est revenu : des falaises de 200 à 500 mètres nous dominent; nous les dominerons au terme de très belles escalades dans un décor grandiose.

"Ce ne sont pas vos tours" nous crient trois jeunes vautours, en revenant de l'aire, installés paisiblement sur une corniche au bord de l'abîme, et qui voient d'un œil mauvais l'intrusion de quelques gaillards munis d'une impressionnante quincaillerie et qui progressent en ahanant le long d'un joli dièdre qui conduit au sommet.

Mais, tout comme le lait, l'heure tourne. Cet après-midi, notre errance à travers Barcelone nous fera voir à chacun quelques facettes de cette ville remarquable (les musées, l'architecture de Gaudi, la cathédrale, le parc Guell, les Ramblas ou déambule dès la fin de la journée une foule compacte qui bavarde et qui regarde, qui vit et qui rit ...).



Encore une valse ? non, merci juste un dernier Talgo.

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